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Aimer la musique de Berlioz n’est
plus une tare inavouable ni une maladie anglo-saxonne :
personne, ou presque, n’ose à présent contester
le génie d’un des plus hardis représentants
du Romantisme européen. Les manifestations du bicentenaire
de sa naissance, en 2003 sont déjà loin, mais
elles ont montré le progrès accompli depuis le
centenaire de la mort, en 1969. Que de conquêtes en moins
d’un demi- siècle : l’édition
critique de toutes les partitions et de tous les écrits
de Berlioz sera bientôt chose faite, presque toute sa
musique a été enregistrée, les travaux
musicologiques (du Dictionnaire Berlioz à la
biographie de David Cairns, des Cahiers de l’Herne
à Berlioz de B à Z, sans oublier les
ouvrages de Pascal Beyls sur Estelle Fornier, Nancy Clapier,
Nicolas Marmion, Louis Berlioz, Marie Recio, Félix Marmion,
nos Cahiers Berlioz (notamment le n° 4 :
Calendrier Berlioz et le n° 5 : Humbert Ferrand)
et l’iconographie de Gunther Braam, semblent représenter
l’essentiel de ce qu’on pouvait faire : tous
les buts que se proposait l’Association nationale Hector
Berlioz, tout ce que pouvaient espérer ceux qui y ont
adhéré depuis cinquante ans, sont atteints, voire
dépassés.
Il ne resterait plus,
donc, qu’à goûter un repos bien gagné…
À moins de considérer que tout commence, au contraire
et qu’il s’agit d’être vigilants. Berlioz,
en effet, ne peut pas être un monument historique. Pas
plus qu’aucun artiste, du reste, mais certains s’en
accommodent mieux que d’autres ; le statu quo
ne lui convient pas. Berlioz doit rester un franc-tireur de
l’Art, un exemple de rébellion fructueuse. Et c’est
cette évidence qu’il s’agit de préserver,
de servir.
Berlioz a encore
des adversaires, mais ils se taisent. Il faut sans doute leur
donner la parole, susciter le débat : choyons nos
ennemis, car ils nous révèlent ce que nos amis
ignorent ; comme le serpent biblique, cause de la chute
et instrument de la connaissance, ils peuvent nous aider à
quitter le Paradis de la consensualité mortifère.
Autant dire qu’il reste à faire et que, s’il
n’est plus nécessaire, comme autrefois, d’adhérer
à l’AnHB pour que Berlioz vive, il est urgent d’adhérer
à présent pour qu’il survive… et
pour que notre association poursuive son action. Depuis dix
ans nous nous sommes efforcés de nourrir nos publications
de contributions originales. Comptes rendus de concerts
marquants, de représentations d’opéras,
de livres et de disques trouvent leur place dans le Bulletin
annuel (qui s’efforce d’être toujours
plus digne de la haute valeur intellectuelle et esthétique
de son héros) et les deux Lélio intermédiaires ;
enfin les Bonnes feuilles qui donnent à (re)lire
des textes historiques de référence sur Berlioz
et sur ses œuvres.
Un dernier mot, essentiel :
l’AnHB n’est pas le domaine réservé
des membres de son Conseil d’administration, aussi les
idées, les propositions, de toutes et de tous sont-elles
les bienvenues.
Gérard Condé
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